Depuis le début de son histoire, le Grand Prix Coupe du monde de Bordeaux attend toujours la victoire d’une cavalière. On se souvient d’une époque où Meredith Michaels-Beerbaum était passée tout près , mais cette épreuve bordelaise reste l’une des toutes dernières du circuit international à encore échapper aux femmes. Cette année, la meilleure chance féminine est allemande. Elle se nomme Sophie Hinners, n’a que 28 ans (ce qui est jeune dans ce sport) et fait partie de cette team des Irons Dames qui a remporté en octobre dernier à Rabat la finale de la Global Champions League, une épreuve par équipe où elles ont battu des formations essentiellement masculines. Et Sophie est particulièrement en forme en ce moment puisqu’elle a décroché sa première victoire sur une étape de la Longines FEI Jumping World Cup™ à Vérone en novembre dernier, battant le champion olympique de Tokyo, Ben Maher… et devenant la première femme à remporter ce Grand Prix ! Elle est à Bordeaux pour essayer d’entériner sa qualification pour la finale de Bâle, bien qu’avec 40 points au compteur, son billet est déjà quasiment en poche. Onzième du classement provisoire, elle est d’ailleurs la seule femme du Top 20 des qualifiés virtuels.

Quel est votre objectif ici, à Bordeaux ? Consolider votre qualification pour la finale de Bâle ? Être la première femme à remporter ce Grand Prix World Cup, comme ce fut le cas à Vérone ?
Mon objectif ici est avant tout de glaner des points pour assurer ma qualification pour la finale, et ce serait un rêve, évidemment, de remporter cette étape.
2024 a été une année extraordinaire avec vos premières victoires importantes en 5*, la finale GCL et la Coupe du monde à Vérone où vous remportiez votre premier Grand Prix 5* : quels sont vos objectifs et vos envies pour 2025 ?
Oui, la saison 2024-2025 a été vraiment fabuleuse. D’abord, c’était la première saison où j’ai pu enchaîner pratiquement uniquement des cinq étoiles, comme notamment la Global Champions League lors de laquelle, avec mon équipe des Iron Dames, nous avons terminé premières au classement final. La victoire à Vérone a été également un grand moment. Pour cette année, j’espère qu’avec mon équipe nous pourrons attaquer tout aussi fort et essayer de nous maintenir au sommet. Mais nous avons également en ligne de mire les championnats d’Europe cet été ainsi qu’une ou deux Coupes des nations.
Racontez-vous brièvement votre parcours à cheval. Êtes-vous née dans une famille de cheval ? Avec qui avez-vous appris ?
Je viens d’une "demi"-famille de cavaliers : mes parents ne sont pas cavaliers, mais mon cousin, mon oncle et ma tante l'étaient. C’est donc par eux que je suis arrivée aux sports équestres et je monte depuis que j’ai trois ou quatre ans quasiment tous les jours. Je dois avouer que, petite, je voulais avant tout faire du dressage et, à poney, j’ai toujours fait un peu des deux avant de m’orienter avec bonheur vers le saut d’obstacles. Après ma première formation, je suis partie aux Pays-Bas travailler trois ans chez Emil Hendrix. C’est là que j’ai commencé à monter en international, mes premiers Grands Prix 2, 3 et 4 étoiles. Je suis ensuite revenue en Allemagne, où je me suis installée dans les écuries Vogel & Will Equestrian. Richard Vogel étant mon petit ami et, avec son partenaire David Will, ils dirigent ensemble cette entreprise.
Samedi, vous monterez Iron Dames My Prins dans la Coupe du monde, pouvez-vous nous le présenter : ses qualités et ses défauts, comment l’avez-vous découvert, ses petites manies ?
My Prins est un cheval à part pour nous. Avant moi, c’était David Will, donc mon boss, qui le montait. Nous le connaissons depuis plusieurs années déjà, nous l’avions même suivi avec son cavalier précédent sur les concours nationaux. Nous l’avions toujours trouvé impressionnant et pensions qu’il avait toutes les qualités. David a ensuite pu le monter pour ses précédents propriétaires, puis Vogel Equestrian l’a acheté. David avait déjà eu beaucoup de bons résultats avec lui, l’avait monté en Coupe des nations et avait remporté le Grand Prix de Mexico. Depuis l’année dernière, j’ai eu le droit de le monter et Deborah Mayer, la fondatrice de Iron Dames, me l’a "sécurisé" pour qu’il reste entre mes mains. Dès notre premier concours, l’année dernière à Falsterbo, nous nous sommes bien entendus. Mais je dois aussi dire que j’ai la chance que David et Richard avaient déjà monté le cheval et le connaissent par cœur ; ainsi, ils ont pu me prodiguer de nombreux conseils, si bien que notre période d'adaptation s’est très bien passée et a été très rapide. D’ailleurs, je l’avais même déjà monté sur le plat à la maison.
Côté qualités, il a d’incroyables moyens, chaque obstacle semble facile avec lui. Il peut être un peu sur l’œil comme lors de la warm-up ici à Bordeaux et faire de petits écarts. Cela arrive souvent le premier jour, c’est un grand cheval, mais il peut aussi être très bébé quand il fait l’idiot comme ça. Mais avec lui, aucun Grand Prix n’est trop haut, on entre en piste et on sait qu’il franchira facilement tous les obstacles. Il se bat vraiment pour moi. Je suis très heureuse de pouvoir le monter.
Parlez-nous de ce projet des Iron Dames : quelle est l’idée derrière ce concept et les objectifs à long terme de cette équipe ?
Le projet Iron Dames a été créé par Deborah Mayer en commençant par les sports mécaniques, puis depuis 2023, également les sports équestres. Ce projet soutient des sportives de haut niveau dans deux disciplines où femmes et hommes s’affrontent dans les mêmes épreuves. L’idée est de nous soutenir et de nous renforcer dans ces deux sports dominés par les hommes, et c’est ce que nous voulons changer. Et de montrer qu’en tant que femmes, nous pouvons également être performantes même si cela est toujours un peu plus difficile pour nous. Mais avec une bonne stratégie, beaucoup de travail et un soutien adéquat, tout est possible. Ce projet est génial, ll y a de plus en plus d'Iron Dames, qu’il s’agisse de jeunes pilotes de karting ou de professionnelles expérimentées. Je suis très reconnaissante d’en faire partie et d’avoir ce soutien incroyable ; je pense que ce projet est assez extraordinaire.
Quel est votre pronostic pour ce Grand Prix Coupe du monde de Bordeaux… à part vous ?
Il faut se donner à fond sur ce genre d’épreuve, une erreur peut vite arriver, la piste est nouvelle pour nous, nous devons y prendre nos marques. Il y a beaucoup de bons cavaliers qui ont besoin d’aller chercher des points ici, le classement de la Longines FEI Jumping World Cup™ est très serré pour l’instant, ce sera une vraie chasse aux points et tout le monde va tout donner.
Comment trouvez-vous ce Jumping International de Bordeaux que vous découvrez ?
Bordeaux est un très beau concours. Mon cheval doit s’habituer à avoir le public autour du paddock, mais je trouve que l’atmosphère est vraiment sympa. J’ai hâte de voir ce que cela va donner avec 7000 spectateurs et cette ambiance si connue de Bordeaux.
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